Certes l’époque, marquée par la Guerre de Cent Ans et les conflits entre familles princières (Armagnacs contre Bourguignons), les révoltes populaires et les assassinats politiques, le Grand Schisme et les horreurs de la peste, était trouble, mais le XVème siècle nous a légué un trésor, le magnifique manuscrit des Très Riches Heures du Duc de Berry, chef d’œuvre de l’enluminure. Le plus célèbre manuscrit au monde est né de la rencontre en 1411 entre un mécène savant et lettré, collectionneur et bibliophile, le duc de Berry, et les trois frères de Limbourg, enlumineurs de génie venus de Nimègue. Mais tous les quatre décédèrent en 1416, si bien que trois générations d’enlumineurs se succédèrent pour terminer le travail. Soit un temps comparable à la construction d’une cathédrale !
L’œuvre, que les médiévistes n’hésitent pas à qualifier de « Joconde des manuscrits », sera redécouverte au XIXème siècle par Henri d’Orléans, duc d’Aumale, qui le léguera au Château de Chantilly. Pour cause de restauration, le manuscrit sera dérelié, ce qui permet l’exposition actuelle des douze folios du calendrier du manuscrit au Château de Chantilly (1). Ces feuilles aux dimensions modestes (29 x 21 centimètres), mêlant couleurs vives, or et argent, se regardent comme un tableau, avec des scènes de la vie quotidienne de l’époque, où se côtoient au rythme des saisons, faste princier et fêtes courtoises, vie profane et vie religieuse, travaux des champs et vie campagnarde : des scènes de la vie paysanne sous la neige à la glandée, en passant par les travaux des champs, la fenaison près du Palais de la Cité à Paris, la moisson devant le château de Poitiers, les vendanges devant celui de Saumur… Ces images que tout un chacun a pu voir dans les livres sur le Moyen-Âge ou sous forme de calendriers, imprimera sa marque dans l’imaginaire collectif, influençant ces dernières décennies Umberto Eco pour son roman médiéval Le Nom de la Rose ou Walt Disney pour illustrer l’architecture des châteaux dans ses contes.
1/ Musée Condé – Château de Chantilly (60) jusqu’au 5 octobre 2025. Entrée 12 €.
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