Mœurs douces

La crise des subprimes est passée par là. Les critiques à l’égard de la mondialisation n’émanent plus seulement des altermondialistes. Des intellectuels, des économistes, qui défendaient la mondialisation les yeux fermés, considèrent désormais que le bilan de la mondialisation n’est pas aussi positif que voulaient nous le faire croire certains de ses thuriféraires, vantant une mondialisation heureuse.

Thierry Pouch, responsable des études économiques à l’APCA, n’est pas de ceux qui croient que le libre-échange fait le bonheur de tous et considère que les institutions internationales ont échoué dans leur tentative pour établir une prospérité mondiale axée sur la libéralisation des échanges agricoles. Dans son livre La guerre des terres (publié chez Choiseul), il met en perspective le débat récurrent, entre libéraux et partisans de l’exception agricole, lancé par l’économiste David Ricardo en Angleterre, au milieu du XIXème siècle. Ce regard historique lui permet de mieux scruter le présent, notamment à travers l’éclosion de crises de plus en plus fréquentes, conséquence à ses yeux de l’échec du libre-échange dans l’agriculture.

Quant à l’avenir, Thierry Pouch n’est guère optimiste. Les conflits entre les grandes puissances agricoles d’hier (États-Unis et Europe) et les puissances de demain comme le Brésil augurent à ses yeux de lendemains difficiles. Une sorte de guerre économique, qui se traduit notamment par l’accaparement des terres par certains États, signe la réhabilitation de la souveraineté alimentaire et le retour de l’agriculture au premier plan des préoccupations gouvernementales. On est loin du doux commerce tel que l’exprimait Montesquieu dans L’Esprit des lois : « Partout où il y a des mœurs douces, il y a du commerce, et partout où il y a du commerce, il y a des mœurs douces ».