Symphonie pastorale

Cet hymne à la vie champêtre qu’est la 6ème Symphonie (la Pastorale) de Beethoven m’a inspiré le thème de ce billet. D’autant que juin est le mois de la fenaison. Qui plus est je venais de parcourir l’excellente publication Reliefs, qui explore nos relations à la Terre et aux vivants et consacre dans son dernier numéro un dossier aux prairies. L’agronome Marc Dufumier y décrit les différents types de prairies dans le monde, l’ethnologue Anne-Marie Brisebarre nous emmène à plus de 2 000 mètres d’altitude à la rencontre des bergers transhumants sur les estives, et l’historien des sensibilités, Alain Corbin, nous propose un voyage poétique et littéraire autour de la fraîcheur de l’herbe…

Disposant d’une image positive dans la société, les prairies sont dans l’air du temps. Elles stockent jusqu’à 85 tonnes de carbone à l’hectare (un peu plus que les forêts), sont un réservoir de biodiversité, malgré le déclin des insectes, et génèrent une activité essentielle dans les régions bocagères et de montagne, où souvent le maintien de la vie rurale est plus compliqué qu’ailleurs. Sans compter les qualités nutritionnelles des viandes et produits laitiers issus d’animaux élevés à l’herbe plus riches en acides gras oméga-3. Les prairies procurent également une meilleure résilience tant aux aléas climatiques qu’à ceux du marché. De réels atouts pour le futur…

Malgré tout les prairies, qui représentent en France moins de 20 % de la surface agricole, ont perdu depuis les années 1980 environ deux millions d’hectares au profit surtout des surfaces artificialisées. Et l’avenir ne s’annonce pas aussi vert qu’espéré. En 2018, des chercheurs de l’INRAE estimaient que le changement climatique s’accompagnerait d’une augmentation des surfaces cultivées aux dépens des prairies et des forêts. Encore plus alarmant, une étude américaine publiée par la revue Science sur les prévisions de changement d’usage des sols au niveau mondial prévoyait une disparition quasi-totale des prairies et des forêts non exploités dès 2055, au profit des cultures pour les agrocarburants.