L’Etat social, en panne !

Le cri d’alarme des Restos du Cœur aura au moins permis de médiatiser la situation des associations qui, depuis la COVID, sont confrontées à un afflux important de personnes en situation de précarité alimentaire alors que les dons (pour celles qui font appel à la générosité) ont plutôt tendance à stagner. Une situation sociale qui s’est amplement aggravée ces derniers mois avec l’inflation. Déjà l’an passé, le Secours catholique tirait la sonnette d’alarme, constatant que le reste à vivre (hors dépenses contraintes) pour la moitié des bénéficiaires, ne dépassait pas 5 € par jour. L’enquête récente d’IPSOS pour le Secours populaire confirme la gravité de la situation, avec un Français sur cinq qui vit à découvert et un sur trois qui rencontre des difficultés pour se procurer une alimentation saine.

Et encore les aides alimentaires proposées, selon une étude publiée la semaine dernière par le Credoc (1), ne concernent que la moitié des neuf millions de nos compatriotes en précarité alimentaire. Parmi les causes, l’étude met en avant en avant la méconnaissance des dispositifs d’aide, mais surtout le sentiment de gène voire de honte, tant l’assistanat, considéré par certains politiques comme « cancer de la société », ou encore « le pognon de fou », ont généré un sentiment d’humiliation parmi les personnes en précarité. Ce refus de solliciter des aides n’est d’ailleurs pas nouveau. ATD Quart-Monde a, depuis des années, montré que plus d’un tiers des personnes pouvant bénéficier des aides sociales (comme le RSA) ne les réclame pas. C’est dire la complexité des problématiques liées à la grande pauvreté, et la difficulté d’accompagner des personnes en précarité pour les sortir d’un sentiment d’insécurité, voire parfois de survie.

Depuis le milieu des années 1980, l’Etat a délégué l’action sociale aux associations. Une forme d’hybridation qui a plutôt fait ses preuves, mais la situation est telle aujourd’hui que l’Etat ne pourra se contenter d’un dispositif curatif, et devra s’attaquer aux causes de ce désastre social.

1/ Credoc : Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie.