En janvier 2021, quelle ne fut pas la surprise des citoyens lambda, dont je suis, apprenant que le ministère de la Santé faisait appel à un cabinet de conseils, en l’occurrence Mc Kinsey, leader mondial du secteur, appelé la Firme (plus de 30 000 collaborateurs), pour mettre en place son plan de vaccinations. Comme si le ministère ne disposait pas au sein de son administration des compétences nécessaires !
Dans leur livre Les Infiltrés, Caroline Michel-Aguirre et Matthieu Aron, nous montrent comment ces sociétés de conseils se sont installées au cœur de l’Etat. De la numérisation des services de l’Etat à la protection des coffres de la Banque de France, de la stratégie militaire à la gestion des prisons, aucun secteur n’y échappe. Au fil des ans, l’Etat a délégué une grande partie de ses compétences, affaiblissant ses prérogatives, abandonnant de sa souveraineté et engendrant une perte de savoir-faire. Une situation ubuesque, pour les auteurs qui constatent que « Plus l’Etat s’externalise, plus les Français sont insatisfaits, plus les fonctionnaires se sentent évincés et plus la dette se creuse ». Qui plus est pour des coûts très élevés. En effet le recours à un consultant (en général dans le but de faire baisser les coûts) revient 4 fois plus cher que de s’appuyer sur un agent administratif. Les auteurs citent l’exemple du général Pierre de Villiers, ancien chef d’état-major des armées, passé dans une société de conseils et dont les prestations sont rémunérées 5 000 € par jour…
L’agriculture n’échappe pas à cette consultomania. L’an passé, comme l’avait révélé Le Canard enchaîné, le ministère de l’Agriculture avait fait appel à Mc Kinsay, dans le cadre du plan de relance post-Covid, « pour structurer le pilotage du volet agricole et en assurer la qualité et la rapidité d’exécution ». Ce même ministère débourse chaque année, comme le notent les auteurs, 588 000 € par an pour fabriquer sa revue de presse. Reconnaissons toutefois que c’est beaucoup moins que Bercy très addict au recours à des consultants…