Les projets de planification reviennent en force, avec la création, il y a deux ans, du Haut-commissariat au Plan, sous la présidence de F. Bayrou, et récemment l’idée mélenchonnienne d’un plan de transition écologique, reprise entre les deux tours de la présidentielle par E. Macron. Après tout cette planification à la française inaugurée à la Libération, n’avait pas si mal marchée ! Et notamment dans l’agriculture, lorsqu’en 1946 René Dumont insistera pour inscrire la mécanisation parmi les six priorités nationales, avec l’aide des fonds du plan Marshall.
Pour les initiateurs de cette planification à la française, Jean Monnet et le général de Gaulle qui évoquait souvent son « ardente obligation », le plan est une institution essentielle. Il se veut alors une création continue qui s’ajuste en permanence, mais aussi une œuvre collective. « Toute la Nation doit être associée à cet effort », soulignait Jean Monnet, qui associait toutes les forces vives du pays aux travaux du Commissariat au Plan. « Quand vous réunissez des hommes d’origine diverse, écrivait Jean Monnet dans ses Mémoires, que vous les mettez en face des mêmes problèmes, et les chargez de les résoudre, ce ne sont plus les mêmes hommes. Dès lors qu’ils ne sont plus là pour défendre des intérêts, ils prennent sans effort la même vue. »
Telle était la méthode Monnet qui perdura un temps mais ne résistera pas à la vague libérale des années Thatcher et Reagan, détruisant sur son passage toute politique d’intervention publique. Le Commissariat au Plan sera remplacé en 2006 par le Conseil d’analyse stratégique puis en 2013 par France Stratégies.
Devant les défis nombreux qui nous attendent, dans un pays par ailleurs tiraillé de toutes parts, la méthode Monnet de concertation permanente à la recherche de l’intérêt général et l’idée de planification par le regard porté sur le futur, permettraient de prendre un peu de la hauteur et de lutter contre cette dictature de l’instant, qui mine le fonctionnement de nos démocraties.