L’abbé Pierre, défenseur des paysans du monde

L’abbé Pierre est de retour, du moins dans les salles de cinéma (1). Si tout le monde connaît son combat pour le logement et contre la misère, bien peu savent son action contre la faim dans le monde. Ecarté (pour des raisons de santé !) du mouvement Emmaüs, l’abbé Pierre va beaucoup voyager et multiplier les rencontres. Ainsi le futur roi du Maroc, Hassan II l’invite à visiter les banlieues misérables de Casablanca et à réfléchir comment stopper l’exode rural. De cette visite naîtra l’IRAMM (Institut de Recherche et d’Action contre la Misère du Monde), qui, travaillera avec des nombreux gouvernements autour de la question agricole et sera pionnier dans les expériences d’animation rurale.

Plus tard avec Josué de Castro, un médecin brésilien, auteur d’un best-seller Géographie de la faim et ancien président de la FAO, et le père Lebret, un Dominicain, sociologue et économiste, fondateur d’Economie et Humanisme, l’abbé Pierre tente de créer une Fondation Mondiale contre la Misère et la Faim, soutenue notamment par Albert Schweitzer. Si, pour diverses raisons, le projet ne se concrétisera pas, pour autant l’abbé Pierre poursuit son action et consacre dans sa revue Faim et Soif de nombreux éditoriaux à cette question, soulignant notamment que « la faim est le vrai problème du XXème siècle ». A l’époque, des polémiques naissent : René Dumont vient de publier L’Afrique noire est mal partie, tandis que l’éditorialiste de Paris Match, Raymond Cartier considère qu’il vaut mieux aider la Corrèze plutôt que le Zambèze. Et l’ONU déclare en 1963 comme priorité la guerre au sous-développement.

Cette même année lors de l’assemblée générale extraordinaire de la FAO à Rome, l’abbé Pierre s’exprimant au nom de la délégation française, qui comprenait (songez du peu !) François Mauriac, Jean Monnet, André Malraux, Pierre Mendès France…, s’insurgeait contre l’ingratitude des sociétés vis-à-vis de ceux qui travaillent la terre en ces termes : « Malheur aux peuples où quiconque sait lire et écrire, croit honteux de répandre sa sueur dans un labeur manuel rural ou ouvrier ».

1/ L’abbé Pierre, une vie de combats, un film de Frédéric Tellier.